Bulletin des AMHE n°36 Janvier 2016
Janvier 2016

Lettre d'information officielle de la FFAMHE

EDITO

Par Olivier Dupuis, président de la FFAMHE

J'interviens pour la première fois en tant que jeune président élu de la FFAMHE dans un éditorial du bulletin. L'année 2015 peut apparaître un peu terne, et notre fédération a peut-être donné l’impression d’être à la peine, et d’avoir du mal à trouver un développement satisfaisant, alors que chacune de nos associations adhérentes réalise un travail riche et soutenu.

En premier lieu, je souhaite rappeler la question primordiale des moyens humains et matériels pour créer un espace propice à de nouveaux projets, à de nouvelles idées afin de participer activement à la construction d’une fédération ouverte et responsable au service des associations affiliées et in fine des Arts Martiaux Historiques Européens pratiqués en France. Concernant les moyens matériels, l’Assemblée Générale a validé en fin d’année 2015 une augmentation des cotisations importante en proportion, mais modeste en volume. Cette décision me semble avoir été la bonne : notre fédération devrait ainsi disposer ainsi d’une capacité d’action plus étendue sans devoir sans cesse reposer sur les finances personnelles des administrateurs bénévoles, des associations membres ou de sponsors providentiels. Un premier budget prévisionnel devrait être présenté très prochainement à l’Assemblée Générale.

Pour les moyens humains, il me paraît temps opportun de relancer un appel aux candidatures à tous les échelons de la vie fédérale. En particulier pour participer aux diverses commissions, pour nommer des représentants actifs auprès de l’Assemblée Générale et enfin pour venir rejoindre le petit cercle des administrateurs. Il est indispensable de garantir un renouvellement régulier des membres actifs, tant pour la bonne vie démocratique de nos institutions, mais aussi pour permettre aux « anciens » de souffler.

En second lieu, je voudrais revenir rapidement sur l’annonce de la Fédération Française d’Escrime du lancement d’une nouvelle discipline appelée « Combat Historique ». Il me paraît important de noter que cette discipline est lancée par une personne qui a fait le choix d’être membre de la FFAMHE, et reprend une idée portée de longue date par un de nos membres fondateurs. Il m'est donc permis de voir dans cet événement la confirmation du bien fondé de notre démarche et de notre mouvement, et comme un de ses fruits indirects. Pour continuer sur la métaphore végétale, je propose donc de nous intéresser aux autres fruits qui murissent depuis quelques années, mais aussi à continuer à planter des graines car nous n’en sommes qu’au début de notre jeune histoire. Je rappelle aussi que si notre fédération a comme but le développement en France des Arts Martiaux Historiques Européens, il n’a jamais été question que nous en ayons le monopole.

S’il me fallait formuler des vœux pour notre communauté pour cette année 2016, ils seraient les suivants : avoir le courage de poursuivre nos initiatives, savoir nager à contre-courant quand c’est nécessaire, cultiver une relation approfondie avec les sources, oser inventer de nouvelles perspectives sans se perdre dans l’arbitraire et le dogmatisme.

RAPPEL SECURITE

Suite aux attentats de novembre 2015, je tiens à rappeler les quelques conseils que nous avions donnés en janvier, après les attentats de Charlie Hebdo:

  • Ne transportez aucun simulateur si vous n'en avez pas besoin.
  • Évitez tout exercice de coupe dans les temps qui viennent.
  • Transportez vos simulateurs démontés si possible (pour les simulateurs nylon), et dans des mallettes fermées par un cadenas. Préférez vos véhicules personnels plutôt que les transports en commun. Dans tous les cas, les simulateurs ne doivent pas être "identifiables", de façon à éviter de provoquer toute angoisse auprès d'autres personnes.
  • Soyez respectueux des forces de l'ordre, et suivez chacune de leurs instructions s'ils vous en donnent, sans aucune opposition.
  • Ne consommez pas d'alcool avant le transport des simulateurs ou avant une séance d'AMHE.
  • Ne transportez pas d'alcool en même temps que vous transportez vos simulateurs.

Sébastien Causse, pour la commission sécurité

ACTUALITES

CONTACTS REGIONAUX DE LA FFAMHE

La FFAMHE vient de mettre en place des délégués territoriaux. Issus du Conseil d’Administration, ils sont désormais les interlocuteurs privilégiés des associations affiliées, ou en cours d’affiliation ou de création. Ils pourront ainsi participer à l’animation du territoire, répondre aux diverses questions, améliorer les relations et échanges entre associations, ainsi qu’entre les associations et la fédération.

Pour ce faire, le territoire français a été divisé en 5 grandes zones :

  • L’Ile-de-France, le contact est pour le moment dévolu au Président (Olivier Dupuis) et au vice Président (Simon Landais)

  • Grand Sud (PACA, La Région Midi-Pyrénées et la Corse)
    Délégué : Jean-Rémy Gallapont

  • Grand Centre (Auvergne Rhone-Alpes et Aquitaine-Limousin-Poitou-Charente)
    Délégué : Thomas Lobo

  • Grand Ouest (Bretagne, Pays-de-la-Loire, Normandie et Centre-Val-de-Loire)
    Délégué : Fabrice Esnault

  • Grand Nord-Est (Nord-Pas-de-Calais-Picardie, Alsace-Champagne-Ardennes-Lorraine et Bourgogne-Franche-Comté)
    Délégué : Aurélien Nouvion

Vous pouvez retrouver leurs coordonnées sur la page "Contact" du site Internet : 
http://www.ffamhe.fr/contact 

DOSSIER DE PRESENTATION DES AMHE

Après de longs mois de travail, la FFAMHE vient de mettre en ligne son dossier de présentation des AMHE. Ce document de 33 pages a vocation à présenter les AMHE de manière quasi-exhaustive.

Le document a été conçu à destination d'un public souhaitant découvrir en profondeur les AMHE, en passant par leurs histoires et évolutions, leurs démarches, leurs transmissions, leurs différentes facettes etc...

Le document en ligne est au format PDF, cependant sa mise en page est adaptée pour l'impression papier recto-verso. Il peut bien entendu être téléchargé et imprimé par les associations affiliées afin de présenter la discipline à leurs différents interlocuteurs, notamment les administrations locales et les assureurs.

Retrouvez la version en ligne ici : http://ffamhe.fr/docs/dossier-de-presentation-des-AMHE.pdf 

De plus la FFAMHE prépare actuellement une plaquette A4 qui sera plus pertinente pour un premier contact que ce volumineux dossier. En attendant que la plaquette soit mise en ligne vous pouvez utiliser la version PDF de notre flyer : http://ffamhe.fr/docs/flyer_presentation_FFAMHE.pdf

NUMERISATION PALAS

Nouvelle numérisation PALAS : Méthode de combat à la baïonnette du Commandant Labrosse – 1917. Le commandant Eugène Labrosse fut directeur de l’École de Joinville-le-Pont.

Au nom de la FFAMHE, un grand merci à tous ceux qui par leurs dons ou leurs conseils permettent au projet PALAS de perdurer.

Retrouvez la numérisation ici : http://www.ffamhe.fr/methode-de-combat-a-la-baionnette-du-commandant-labrosse-1917

ACTA PERIODICA DUELLATORUM

Les articles d’Acta Periodica Duellatorum sont mis en ligne sur le portail De Gruyter : http://www.degruyter.com/view/j/apd.2015.2015.issue-1/issue-files/apd.2015.2015.issue-1.xml

SI VOUS L'AVIEZ MANQUE LE MOIS DERNIER

Le magazine l’Art de la Voie a dédié son numéro de décembre aux Arts Martiaux Historiques Européens. La Fédération Française des Arts Martiaux Historiques Européens a été approchée pour la rédaction de ce numéro. Le magazine est disponible gratuitement sur internet. Rendez-vous sur le site de la revue : http://www.lartdelavoie.com

L'art de la voie

PREMIERS SECOURS ADAPTES AUX AMHE

La Fédération Française des Arts Martiaux Historiques Européens se dote d'un nouveau document de recommandation de sécurité. Il s'agit d'une aide aux premiers secours adaptée à la pratique des AMHE. Ce document ne se substitue pas à une réelle formation auprès d'un organisme agrée. Il pose néanmoins les premières connaissances à avoir pour faire face aux risques encourus par la pratique des AMHE.

http://www.ffamhe.fr/wp-content/uploads/2015/11/PCS1-adapt%C3%A9-aux-AMHE.pdf

ÉVÉNEMENTS A VENIR

Stage La Compagnie de Dagorlad, 6 et 7 février

Stage Dagorlad

FECHTSCHULE à Avon, 14 février 2016 

Lutz Horvald, membre honoraire de la FFAMHE, organise une Fechtschule le 14 février 2016, à Avon.

36 participants maximum. Clôture des inscriptions le 7 février.

Informations : https://drive.google.com/file/d/0BysHQT__68ERdW5GYkNZdVJCbnM/view 

Inscriptions : https://docs.google.com/forms/d/1T3ggR_Z9ApC-qeQ6moWYKfS3Aro6sQTUNi0iubECkO0/viewform 

Fechtschule à Avon

Stage PAUERNFEINDT, 20 et 21 février 

L'ELSAMHE organise le stage "Pauernfeindt : Vienne 1516 - Strasbourg 2016", les 20 et 21 février 2016 à Strasbourg pour commémorer les 500 ans de l'impression du traité de Pauernfeindt, un des tous premiers traités d'AMHE imprimés.

Le programme devrait suivre le contenu du traité : épée à deux main, messer, bâton, épée / bocle et dague.

Les inscriptions pour le stage "Pauernfeindt : Vienne 1516 - Strasbourg 2016" sont ouvertes depuis début janvier. Pour plus d’information et accéder au formulaire d’inscription, je vous invite à utiliser la page officielle du stage : http://elsamhe.fr/stage/stage.html

Montpellier HEMA Tournament : 12 et 13 mars 2016

Le 12 et 13 mars 2016, l'École Chevaleresque organise la 7ème édition du MONTPELLIER HEMA TOURNAMENT. Il se tiendra à la maison pour tous Michel Colucci à Montpellier.

Deux compétitions seront ouvertes à toutes et tous (OPEN). Elles se dérouleront tout au long des deux journées dans les disciplines « épée longue » et « épée bocle ».

Une compétition supplémentaire dans la catégorie féminine sera organisée si le nombre de participantes est suffisant. Il sera possible de participer à toutes les compétitions.

Ces tournois se feront avec arrêt à la touche et uniquement avec des simulateurs en acier, flexibles et adaptées à la pratique des AMHE.

Règlement : https://drive.google.com/file/d/0B_qGmqafzevZWEZzZkx5VmlqQ1U/view 

Événement facebook : https://www.facebook.com/events/1454662778171658

Renseignements : contact@chevaleresque.com 

Inscriptions : http://goo.gl/forms/0g1rKTXjmk

Montpellier Hema Tournament

I.33 Collegium, 26 et 27 mars

En collaboration avec l’association allemande Alte Schule (Bochum), l’association Ex Machina organise un week-end de rencontres et d’échanges dédiés au I.33. Pas de schéma classique « instructeur – élèves » mais des échanges entre pratiquants

Un événement facebook a été mis à disposition pour suivre l’actualité de l’événement et obtenir les informations nécessaires : https://www.facebook.com/events/957635237631825 

Vous retrouverez les informations utiles sur le guide suivant :
https://drive.google.com/file/d/0B60yZ0wWqakPaEpwM21QZXduVnM/view?usp=sharing

Pour tout renseignement et demande d’inscription: assoexmachina@gmail.com

I.33 collegium

Stage AMHE de Nantes - 2 et 3 avril 2016 

L'édition 2016 du stage de Nantes aura lieu le week-end du 2 et 3 avril 2016. Plus d'informations prochainement sur le programme et les inscriptions.

HEMAC Dijon 15ème édition - 28 avril au 1er mai 

Dijon 2016, Quinzième édition : les inscriptions ne vont plus tarder à ouvrir, surveillez le site hemac-dijon.com

Hemac Dijon

HEMAC Florence – 27 au 29 mai 2016

L'organisation de la troisième édition de l'HEMAC-Florence lance un appel aux personnes désirant présenter leurs travaux.

Tous les renseignements sont disponibles ici :
http://www.hema-florentia.it/wp-content/uploads/2016/01/Florentia_2016_Call_For_Papers.pdf

PARIS HEMA OPEN – 18 et 19 juin 2016

AMHE Paris organise un Open dédié à l’épée longue et à la rapière. 

Paris Hema Open

VILLENEUVE HEMA TOURNAMENT 5ème édition – 18 et 19 juin 2016 

Médiéval Combat organise la 5ème édition de son tournoi international avec une nouveauté cette année : des ateliers et une conférence. Concernant les tournois, ils seront sur les disciplines suivantes : épée longue, épée bocle, rapière, dussack.

Le tout dans une ambiance estivale au bord de la méditerranée, à Villeneuve-Loubet (entre Cannes et Nice). Plus d'informations le mois prochain. Pour tout renseignement : contact@medievalcombat.fr

Villeneuve Hema Tournament

MÉDIAS

De retour du stage AMHE IDF 2015 à l'Isle Adam

Découvrir d'autres AMHE ?

RETOUR SUR LES EVENEMENTS RECENTS

Stage GAGSchola des 16-17 janvier 

Le 16 et 17 janvier 2016 eut lieu à Genève deux journées de stage organisées par l'association GAGSchola (CH). Le samedi, entièrement consacrée à la canne du XIXe et XXe siècle, fut dense et riche :  de la canne française de salle avec Larribeau et Leboucher présentés par Jérémie Clog et Olivier Dupuis (ELSAMHE), de la canne "anglaise" selon Vigny par Claire Hugues et Johann Perrigault (OGN) et de la canne de self-défense d'après Dubois, Emile-André et Jospeh-Renaud par Cyril "Kurso" Perrier (Les Choses aux Poings) et Vincent Deluz (GAGSchola). Il tient à cœur de l'association GAGSchola de promouvoir les AMHE de la fin du XIXe siècle.

A ce titre, nous remercions en particulier les instructeurs de la FFAMHE qui ont accepté de venir en Suisse pour partager leur science de la canne.  

Le dimanche, l'ELSAMHE proposa deux ateliers sur l'escrime de Joachim Meyer. La matinée fut consacrée au bâton et l'après-midi à l'épée à deux mains, s'intéressant en particulier au Zornhut et les possibilités martiales associées à cette garde. Cet atelier a été particulièrement enrichissant pour la pratique de l'épée à deux mains. Les participants ont pu ainsi élargir leur compréhension de l'escrime de Joachim Meyer et appréhender cette garde qui n'est pas facile à saisir dans la logique martiale. 

L'événement a rassemblé une trentaine de participants, chaque jour, provenant de Suisse romande, de Suisse allemande et de France. Ce fut un franc succès !

Vincent Deluz, président de GAGSchola

Stage GOAMHE du 17 janvier 

Le 17 janvier dernier se tenait à Dinan le 3ème rassemblement des associations d'AMHE du Grand Ouest. A cette occasion, un peu plus de 70 participants ont fait le déplacement, soit une vingtaine de personnes en plus par rapport à l'édition 2015. Un constat qui met en avant le dynamisme du GO AMHE qui, avec ce rassemblement, propose un véritable moment privilégié pour tous les AMHEurs de l'Ouest, quel que soit leur niveau ou leur implication.

Les échanges furent riches et nombreux : le matin était dédié aux démonstrations, l'après-midi aux ateliers.

Nos amis du Maine nous ont d'abord présenté leur interprétation du Holmgang viking (combat et contexte, plus d'informations ici : https://collectifcombatviking.wordpress.com/travaux/article-le-holmgang 

Mais point de conférence unilatérale ici, un temps de parole permit à tous d'échanger idées et réflexions, afin d'enrichir le travail de chacun. S'ensuivit alors une discussion autour de l'archéologie expérimentale et de la reconstitution du geste et de sa contextualisation. De grands concepts avec comme questionnement fondamental : faisons-nous réellement ici des AMHE ? Un véritable moment clef de ce rassemblement où chacun est invité à s'exprimer librement afin d'enrichir notre vision des AMHE et permettre aux associations de mieux travailler ensemble.

Les Nantais ont pris la suite en nous présentant deux armes peu représentées dans la sphère AMHE, l'épée de cour et la faucille. Ces deux démonstrations illustrent la richesse et la variété des disciplines pratiquées dans les associations de l'Ouest. 

L'après-midi a confirmé l'état d'esprit de la matinée : les ateliers proposés étaient participatifs et privilégiaient avant tout l'échange autour des interprétations et des pratiques. Ainsi, deux ateliers se sont déroulés en parallèle dans cette idée, l'un sur l'épée longue, l'autre sur le travail du bouclier.

Le premier, animé par Christophe Barbagallo, permettait aux participants de « passer à la moulinette» leur interprétation d'une pièce en la confrontant à un contexte d'assaut libre. Ceci permettant d'évaluer l'efficacité et donc la pertinence de l'interprétation proposée qui était ensuite enrichie du regard de tous.

Le second atelier, mis en place par Fabrice Esnault, proposait un travail comparatif dans la pratique du bouclier (principalement le scutum du provocator, le bouclier gaulois et le bouclier viking) avec une réflexion collective sur les limites de l'interprétation du geste au regard des sources disponibles.

En filigrane de cette journée, des initiations et des groupes de travail ont pris place aux quatre coins du complexe sportif : boxe, lutte, épée-bocle, sabre, etc. Les sources se mélangeaient aux armes, les réflexions aux sparrings, les Finistériens aux Ligériens.

La journée du GO AMHE n'aura pas manqué de rencontres, d'échanges ni même de sueur : une belle occasion de cultiver une véritable envie de travail inter-associatif et de faire naître de nouveaux projets, à différentes échelles, qui devraient voir le jour grâce à l'enthousiasme général et au dynamisme sans faille des pratiquants de l'Ouest.

Fabrice Esnault 

RÉFLEXION THÉMATIQUE

Les AMHE, de la recherche à la compétition, leurs limites, et pourquoi ils faut les faire disparaître... (les limites!), par Antoine Coudre

Les Arts Martiaux Historiques Européens.... Nom de nom, voilà bien un intitulé fourre-tout... Si on en croit la définition française il s'agirait de l'étude et la pratique via des sources historiques d'arts martiaux dont la pratique a été discontinue de l'Antiquité à nos jours sur le territoire européen... et encore c'est un résumé.

Amusant comme cette définition est à la fois large, imprécise et limitative tout en reposant sur des mots ou concepts eux mêmes mal définis : dates, type de sources, notion de pratique discontinue, zone géographique etc.

Déjà reconnaissons-le... c'est mal barré pour que tout le monde soit d'accord sur ce que cela représente. Mais admettons un instant que ces éléments soient communément acceptés. Cela laisse un immense corpus de travail et de pratiques au sein duquel la nature des pratiques prête à controverse sans compter les méthodes qui l'encouragent elles-mêmes.

Et face à cet imbroglio historico-culturo-méthodique, se matérialisant en des pratiques physiques diverses et variées, se trouvent des personnes qui ont cherché (ou cherchent encore) à se fédérer et à définir le champ de leur pratique en lui posant des bornes.... Pris avec du recul et de manière dépassionnée... franchement... objectivement... qui peut penser sérieusement cette tâche possible ?

Mais alors... doit on pour autant baisser les bras ? Mène-t-on uniquement les combats que l'on peut gagner ? Chacun répondra en son âme et conscience et traitera celui d'en face d'inconscient/utopiste ou de lâche/fainéant.

Allez... partons du principe que la charrue n'a pas été mise avant les bœufs et rajoutons un paradoxe de plus à la problématique, ou plutôt une problématique née d'un paradoxe:

Dans un art martial "vivant" sa dynamique correspond à un cycle assez simple en quatre étapes: expérimentation/formalisation puis pratique/entrainement, test/compétition et enfin pratique réelle (entendre: le plus souvent mortelle) dont les enseignements intègrent généralement la première étape et ainsi enrichissent le cycle. 

Dans un art martial "sportif" la dynamique exclue la pratique réelle qui est remplacée par la compétition comme objectif premier des pratiquants, ce qui entraîne généralement un "appauvrissement" de la pratique (issue à la base d'un art martial "vivant") du fait des restrictions imposées par les règles et conventions compétitives. 

Enfin dans un art martial "historique" il n'y a pas de cycle. C''est justement parce qu'il a été brisé qu'il faut inclure une première étape de recherche fondamentale dont les résultats nourrissent ensuite une dynamique proche de la précédente. Mais il ne s'agit pas là d'un cycle car sinon il cesserait d'être un art martial "historique" pour redevenir un art martial "sportif" et appauvri. 

Dans une pratique qui se cherche encore et à un moment où ce qui pourrait être le premier cycle se termine la terreur règne chez les pratiquants de la première heure... Les AMHE vont devenir un sport.... HORREUR !

En fait les cas d'affranchissement de l'étape de recherche fondamentale se multiplient. C’est finalement normal, car la publication et la convergence des résultats au bout de bientôt quinze ans pour certaines sources font que son importance devient marginale dans ce cas précis. Ce cas se généralisera avec le temps... rien de plus normal encore une fois. Non le vrai problème c'est la transformation d'une dynamique en cercle vicieux par l'intégration des enseignements pratiques (autrement dit le retour de la compétition en l'absence de combat réel) dans le corpus enseigné.

Horrifiés donc, certains veulent bannir ou tout le moins marginaliser la pratique compétitive, mère de tous les vices car ouvrant la voie à la fin de l'historicité... et l'avènement des AME sans le H et donc sans âme selon eux. Mais de quoi ont ils peur exactement ? Simplement de l'humanité et de ses défauts intemporels (le fait que la plupart soient historiens ou érudits n'aide pas de ce fait). Pour mieux comprendre décortiquons le panel des pratiquants et des pratiques:

Reposant donc sur l'étude de sources historiques diverses et variées qui ensuite doivent être expérimentées, interprétées pour être finalement pratiquées, le corpus des pratiquants des AMHE s'étire d'un bout à l'autre d'un horizon aux extrémités opposées et qui entretiennent le paradoxe et ses dangers.

D'un coté il y a la recherche fondamentale, aride, obscure où les chercheurs se doivent d'avoir une formation scientifique et une maîtrise de sciences annexes la plus poussée possible représentant une bonne dizaine de milliers d'heures de formation et cela avant même de s'être penchés sur la moindre source. Et de l'autre des pratiquants compétiteurs ayant passé plus de cinq mille heures à suer sang et eau en suivant des préceptes d'un autre âge et à parcourir des milliers de kilomètres pour rencontrer et échanger avec d'autres pratiquants. Une poignée ont même fait les deux... une poignée seulement et on le comprend.

Et puis au milieu il y a des pratiquants, les plus nombreux, qui n'ont ni la formation nécessaire pour être des chercheurs ni le temps et les qualités physiques pour être de grands compétiteurs et qui se contentent d'apprécier leur pratique à leur niveau. Et bien sur parmi ces catégories il y a des exceptions, le plus souvent en bien, parfois en mal.

Et voilà le paradoxe... : la pratique n'existerait pas si une poignée de chercheurs ne l'avaient pas exhumée, mais elle n'existe qu'à travers ses pratiquants dont la qualité à un moment se mesure presque naturellement par opposition ce qui implique une pratique compétitive et in fine l'apparition d'une "élite" pratiquante. En théorie appartenir à l'un des groupes n'exclue pas l'appartenance à l'autre. Dans les faits, atteindre l'excellence dans les deux domaines relève de la gageure. Mais là n'est pas le problème. L'être humain (ok surtout les hommes) est instinctivement attiré par l'attitude compétitive... c'est comme ça et, qu'on le veuille ou non, c'est un moteur de l'émulation dans la société humaine. Alors forcément les icônes des pratiquants ce sont le plus souvent les compétiteurs victorieux, de la même manière que tous connaissent Napoléon et infiniment peu connaissent le comte de Guibert. Mais encore une fois l'un sans l'autre ne serait connu de personne. Mais plus le nombre de pratiquants augmente plus la notoriété des uns se dilue là où celle des autres grandit... alors même qu'ils sont à la base de celle-ci... et l'expérience montre qu'ils ont raison d'avoir peur.

En effet, et c'est la fin de la théorie et le début de la dure réalité, certains ont déjà décidé de s'affranchir d'eux, et ils seront de plus en plus nombreux avec le temps, prenant le chemin de la "sportivité" pure et dure avec ses codes bien connus et rassurants et on peut l'espérer à la clef l'expansion de la pratique qui y gagnera donc en visibilité et notoriété ce qu'elle perdra en authenticité et intérêt. Et après tout pourquoi pas ? Nos ancêtres se sont assez battus pour  notre liberté pour que ce détail de l'histoire de l'Humanité ne fasse pas débat. Si les pratiquants veulent que cela arrive, cela arrivera et personne ne pourra jamais empêcher deux personnes de s'affronter conventionnellement et des dizaines de se rassembler pour faire de même etc. etc. et puis après ? Les pratiques n'ont qu'à diverger, l'une grandira, l'autre périclitera, ce n'est qu'un détail de l'Histoire...

Oui mais les détails ont de l'importance. Tout d'abord cette pratique a été créé comme "historique" et cette étiquette ne disparaîtra pas comme cela (voir les campagnes de communication de la Fédération Française d’Escrime pourtant déconnectée de son histoire depuis longtemps). Cela fait peser une responsabilité sur tous les pratiquants n'en déplaise à l'homme des tavernes qui se moque de l'Histoire comme de sa première bière. Hé oui, l'Histoire est une science dont la pratique ne s'apprend pas en s'abonnant à un magazine, tout comme avoir un brevet de secourisme ne fait pas de vous un médecin. Passons aussi sur le fait que les débutants seront comme toujours attirés par les paillettes et les strass issus de la starification et d'une pratique plus facile au premier abord et donc priveront une pratique au dépend de l'autre... Mais surtout, n'avons nous rien retenu collectivement des travers du "tout compétitif" dans le sport ? Non ? Sport-business, dopage, pari, dangers sanitaires, etc. etc.,.. Cela ne vous dit rien ? Certes on en est loin mais... saurons-nous reconnaître le moment où nous en prendrons le chemin ? Si vous pensez que oui, vous vous trompez parce que c'est déjà le cas. Mais il n'est pas trop tard.

Les pratiquants d'AMHE ont en effet aujourd'hui une occasion qui est à la fois une opportunité et une responsabilité immenses. Créer et développer un ensemble de pratiques martiales alliant le meilleur de l'intellect et du physique, un ensemble de pratiques sportives dont les fondements chercherons à éviter les travers de leurs prédécesseurs. Qui plus est, de par son indéniable dimension culturelle, un ensemble de pratiques qui bénéficient à l'humanité. Mais pour cela il est nécessaire d'enlever les œillères et de dépasser les bornes. La première conditions pour éviter un piège est certes d'en connaitre l'existence mais si il vous empêche d'avancer il aura rempli son office. Les AMHE doivent embrasser la pratique compétitive. Non comme une fin en soit, mais comme une pratique incontournable qui si elle doit générer un jour des moyens matériels, devra alimenter la recherche (on peut rêver). Nos champions ne doivent ni être adulés, ni mis à l'index mais reconnus pour ce qu'ils sont, des combattants maîtrisant à force de travail un art qui leur a été rendu accessible par d'autres. Finalement voila une bonne raison de se fédérer, s'assurer que chacun a sa place dans le panel des pratiques des AMHE. Il faut se servir de la synergie fédérative pour résoudre les problèmes et pas en créer.

Ah zut ! Nous sommes retombés dans la belle théorie et plus dans la dure réalité.

Alors finalement redevenons terre à terre si il n'est pas trop tard. Il n'y a pas de limites à imposer à la recherche d'un côté et à la compétition de l'autre, nous devons nous nourrir des conventions différentes comme des interprétations différentes tout en sachant qu'un jour ou l'autre une convention consensuelle tout comme une interprétation consensuelle apparaîtront. Notre responsabilité n'est pas d'empêcher l'inévitable mais d'empêcher l'inacceptable : à savoir une Histoire violée et un sport bafoué. Et si il y a des œillères à enlever, il n'y a finalement qu'une seule cloison à construire... et c'est urgent... même si la tâche est dure et ingrate: les champions ne doivent pas enseigner en tant que tels, quels que soient leurs diplômes y compris sportifs. Oui car les AMHE sont un peu plus qu'un ensemble de sports et ils portent plus que cela. Et c'est pour ça qu'à l'image d'un "Maître d'armes" qui doit obtenir un BPJEPS pour enseigner (ce qui n'a pas grand chose à voir avec son titre), à contre pied, les responsables d'enseignement d'AMHE doivent obtenir un master en Histoire d'abord (après tout comme cela ils seront vraiment des Maîtres !).

Ce n'est sans doute pas la panacée et bien des questions sur les AMHE et leur pratique sont mises de côté dans ce raisonnement. Mais au moins cette solution aurait le mérite d'être une preuve d'ouverture et de différence plutôt que d'étroitesse d'esprit et de conformisme.

Après, cela n'empêchera jamais l'homme des tavernes de continuer à vivre à l'âge de bière en agitant un bout de métal ou de bois, et en piochant le peu qu'il comprend et qui l'intéresse dans une œuvre que d'autres ont mis à sa disposition et sa portée tout en affirmant qu'il fait mieux qu'eux. Oui il y en a qui osent tout, c'est même à ça qu'on les reconnait. Est ce à dire qu'il faut collectivement se mettre au même niveau en dénigrant de la même manière ceux qui font des efforts pour compléter la pratique des AMHE par une pratique compétitive qui a de tout temps existé et qui est indispensable et inévitable ? Que ceux qui le pensent lèvent la main... on les reconnaîtra aussi... ne leur en déplaise!

Antoine COUDRE

 

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