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Édito de Didier G. & Michaël H.
C’était il y a 10 à 15 ans. Ce n’est pas une époque très éloignée, mais beaucoup d’AMHEurs ne connaissent pas ou peu cet « âge héroïque ». En ces temps-là il n’y avait rien, ou pas grand-chose. Il y avait des gens passionnés d’escrimes et d’arts martiaux, pétris d’histoires, réelles ou imaginaires et animés par des questions. Y avait-il des arts martiaux avant l’invention de l’escrime moderne ou se battait-on sans intelligence et sans finesse comme l’histoire officielle le laisse souvent entendre ? A-t-on eu en Europe des arts martiaux comme nous les connaissons au Japon ou en Chine ? Et s’il y en avait en Europe pourquoi se sont-ils perdus ? Qu’en reste-t-il ?
Internet a été un formidable catalyseur par lequel et au sein duquel s’est opérée l’alchimie. Il a permis de faire se rencontrer ces passionnés, virtuellement puis « dans la vraie vie ». Il a permis la mise à disposition des sources et des travaux de la communauté internationale des AMHE. Les entraînements se faisaient dans les parcs et les jardins. Pour le matériel nous allions plus souvent dans les grandes surfaces de bricolage que dans les magasins de sport. Nous étions en quête du simulateur parfait et de la protection ultime. Les casses étaient nombreuses, les bobos aussi. 
La passion, une certaine ouverture d’esprit, le désir de liberté voire même une certaine forme de rébellion, l’entraide au sein de la petite communauté naissante où nous nous connaissions tous, le partage total des informations… ce sont des valeurs que nous associons aux débuts des AMHE. Elles ne sont pas sans rappeler celles des hackers (pas les pirates, mais les ingénieux bidouilleurs en informatique) ce qui finalement n’est pas surprenant, compte tenu du rôle central joué par Internet dans le développement de notre loisir. Les temps changent. Les sources à notre disposition sont vertigineusement plus vastes et de mieux en mieux comprises. La population des « hackers » de manuels anciens cède la place petit à petit au profit des instructeurs capables de former une nouvelle génération de pratiquants. Ces derniers, nombreux maintenant, viennent vers les AMHE comme on viendrait au Judo ou au Systema. Ne serait-ce pas d’ailleurs un signe que nous avons réussi à (re)créer un véritable art martial ? Le petit monde volontiers anarchique des AMHE se structure, la FFAMHE en est la preuve. L’activité jadis informelle s’institutionnalise pour offrir ce qu’on est en droit d’attendre d’un loisir moderne: un instructeur qui connaît son sujet, une salle pour s’exercer et apprendre au sec et au chaud, du matériel adapté et une pratique conforme aux exigences modernes de sécurité. Ces dernières années l’aspect compétitif des AMHE tend à se développer fortement sous l’impulsion des USA et de la Suède. Fechtschule America 2013 s’est déroulé le mois de mars dernier. Le tournoi fut diffusé en direct sur Internet avec tout le décorum de ce genre d’évènement : des commentateurs sérieux, des interviews durant les pauses, des publicités pour les sponsors.. La qualité des compétiteurs et des arbitres était tout aussi remarquable. Cependant, la pratique de tournoi ou de compétition, bien qu’historique et attestée, divise toujours la communauté des AMHE. Elle est vue par certains comme une source d’appauvrissement technique où l’on ne garde que les coups permettant de marquer la touche. Pour d’autres il s’agit du seul vrai moment où nous pouvons appliquer et valider les techniques historiques en situation de stress. Les temps changent et la discipline que nous avons vu naître, à laquelle nous avons contribué, nous échappe petit à petit, à nous les « vieux des AMHE ». C’est la vie… Les AMHE sont bien vivants, même si les maîtres que nous étudions sont morts il y a longtemps. Les AMHE évoluent, la sportivisation est une tendance, la professionnalisation en sera une autre. Il appartient à nous tous de choisir si nous souhaitons cette évolution. Est-ce inéluctable, peut-on l'accompagner ou doit-on même l'encourager ? Est-ce que ces tendances fortes peuvent cohabiter pacifiquement ? Voilà des questions et des incertitudes et dans ce contexte il peut être utile, voire nécessaire, de revenir à nos fondamentaux, les sources et les valeurs des AMHE. Didier G. & Michaël H. – ARDAMHE-IDF
Événements à venir :02 juin, Dinan. Premier rassemblement des associations d’AMHE de l’Ouest : La Confrérie de la Corneille organise un rassemblement AMHE de l'ouest sur le format des rassemblements « Panamhe ». 08-09 juin, Villeneuve-Loubet – fête de la renaissance (1538) : L’association Médiéval Combat organise un tournoi AMHE multi-armes. Les compétiteurs s’opposeront à l’épée longue, à l’épée bocle et à l’arme de leur choix. Les simulateurs employés seront fournis par l’organisation. La participation est gratuite et l’organisation propose de loger les compétiteurs qui viendraient de loin. Pour en savoir plus, contactez contact@medievalcombat.fr 06-07 juillet, Auch : La mise en place du premier stage d’épée de cour avance ! Pour en savoir plus et éventuellement participer, cliquez ici. HEMAC Dijon 2013 : Les inscriptions pour le plus grand événement d'AMHE français sont closes. Il reste toutefois possible d'y participer grâce à des formules à la journée incluant seulement la participation aux ateliers. Pour en savoir plus, cliquez ici. La prochaine rencontre Panamhe (collectif des pratiquants d'AMHE d'Île-de-France) : aura lieu le dimanche 26 mai 2013 à Fontainebleau. Pour en savoir plus et éventuellement participer à cet événement, vous pouvez contacter l’association Artes Belli à cette adresse : artesbelli@voila.fr Actualité des AMHE :Le vainqueur de la première édition du Prix Philippe Errard est Sébastien Romagnan. La qualité de l’atelier proposé et la clarté de son dossier ont fait l’unanimité auprès du Jury. Liant les qualités de chercheur et de pédagogue, Sébastien a su nous proposer un atelier parfaitement circonscrit – l’étude de l’Atajo – appuyé sur un considérable travail de recherche. Les autres dossiers n’ont pas pour autant démérité. Les dossiers sur Marozzo, Mair et Medel présentaient ainsi d’incontestables qualités de recherche. Toutefois, il ne peut y voir qu'un seul vainqueur et c'est Sébastien qui a emporté la palme. Une somme de 200 euros lui sera attribuée ainsi que la possibilité de présenter son atelier dans l’événement AMHE français de son choix. Le prix Philippe Errard vise à faire connaitre le travail d’Amheurs encore peu connus. Chers organisateurs d’événements, sachez que tous les candidats du prix Philippe Errard ( Catherine Loiseau & Aurélien Calonne, Lutz Horvath, Pierre-Henri Causin et Sébatien Romagnan) ont toutes les qualités requises pour présenter de solides ateliers. N’hésitez pas à les solliciter ! Guide des tests de coupe : La FFAMHE a mis à la disposition de la communauté des AMHE un article relatif aux tests de coupe rédigé par Olivier Gourdon. Les tests de coupe sont une facette à part entière de l’étude des AMHE. Olivier nous éclaire sur la façon de les comprendre, ce qu’on peut en attendre et la façon de les effectuer. Pour télécharger le guide, cliquez ici. Vidéos pédagogiques sur la lutte et l'épée/bocle : Afin de diffuser les méthodes d’entraînements, certains pratiquants ont décidé de filmer les ateliers dispensés lors de stages et de les diffuser sur la chaîne YouTube de la FFAMHE. Les deux premières vidéos postées sont celles des ateliers d’Alexander Pierre sur la lutte du Codex Wallerstein et de Fabrice Esnault sur l’épée/bocle selon Lignitzer. Vous y trouverez non seulement la présentation de pièces, mais également des exercices d’apprentissage. Rendez-vous sur la chaîne YouTube de la FFAMHE ! Bienvenue à Lys et Leopard ! L’association girondine vient de finaliser son processus d’adhésion à la fédération française des arts martiaux historiques européens. Ses membres se réunissent chaque semaine autour de l’étude de la lutte et de la dague de Fiore Dei Liberi, ainsi que la pratique de l’épée bocle selon le MS I.33. Pour en savoir plus sur cette association, cliquez ici. Le site de la FFAMHE en anglais ! Désormais le site Internet propose une page adressée aux anglophones. Cette fenêtre ouverte vers l’international nous rappelle que les AMHE sont pratiqués dans de nombreux pays en Europe et en Amérique. Accédez à la version en anglais. Stage d’AMHE à Nantes 6 et 7 avril 2013 : Pas moins de 60 participants se sont réunis autour de la pratique de la lutte, de l’épée bocle, de l’épée de côté et de l’épée longue à l’occasion de ce premier stage organisé par le Cercle des escrimeurs libres nantais. Les échauffements encadrés le matin et le midi après le déjeuner ont participé au dynamisme de ce stage par ailleurs éreintant. On peut d’ores et déjà affirmer qu’une deuxième édition aura lieu en 2014.  Stage d’AMHE 6 et 7 avril 2013, Rochemaure : Gilles Martinez a animé un stage de deux jours sur l’épée, la lance et le bouclier aux XIe-XIIIe siècles. L’association organisatrice Académie Amhe est parvenue à réunir une vingtaine de pratiquants pour travailler le combat de groupe.  Interview
Gath, membre et responsable communication de l’Ost du Griffon Noir (OGN) - Toulouse, 40 adhérents (ostdugriffonnoir.com). Interviewer : Gaëtan Marain.Gaths, depuis combien de temps pratiques-tu les AMHE à l’OGN ? Je pratique les AMHE depuis les débuts de l’OGN, ce qui correspond à la fin d’année 2010. À ce moment-là, l’OGN n’existait pas encore vraiment, nous étions une poignée, et sans salle. Peux-tu nous expliquer brièvement comment est né ce groupe ? La naissance de l’OGN est corollaire à l’ouverture de la boutique médiévale – le Griffon noir – d’Antonius (par ailleurs Président de l’Ost du Griffon Noir) ; à ce moment-là, en été 2010 il me semble, les AMHE étaient inconnus d’Antonius ; cependant il s’est mis à vendre des épées en plastique renforcées avec tout le matériel de reconstitution. C’est à ce moment que certains clients se sont demandés si on pouvait pratiquer l’épée médiévale sans pour autant s’embêter avec tout le Saint-frusquin reconstitutionnaliste, tel que les armures ou les costumes d’époque. Le groupe est né ainsi, dans un véritable S.A.V. des épées du Griffon Noir, avec de premières sessions sur les bords de Garonne, à même pas 100 mètres de la boutique. Au même moment, Antonius prend conscience de l’existence du monde des AMHE, et commence à prendre des contacts en Europe, et particulièrement avec le club Hammaborg, dont un membre, Roland, est sur le point de venir s’installer à Toulouse. Son arrivée a alors tout déclenché, et c’est grâce à lui, ainsi que William (qui avait pratiqué les AMHE auparavant), que l’Ost va se former en groupe AMHE, et s’élargir petit à petit. Quelles sont les principales sources et armes étudiées à l’OGN ? Principalement l’épée-bocle avec le MS I.33, vient ensuite l’épée longue selon Vadi (MS.1342) et selon Liechtenauer. Il existe aussi un pôle-étude lutte médiévale, basé sur plusieurs sources comme Fiore par exemple. Comment se déroulent vos sessions d’entraînement en général (temps, organisation, types d’exercices) ? En général, les cours durent entre 2 et 3 heures, du fait du temps restreint d'accès à la salle, et commencent par des échauffements (stretching, cardiaque, musculaire) ; on pratique ensuite des solo-drills et/ou des enchaînements de gardes pour faciliter leur assimilation. Ensuite, le groupe peut être modifié selon le niveau des élèves, et les instructeurs montrent de nouvelles techniques à apprendre ou en revoient des anciennes, puis les élèves reproduisent les techniques lors d’exercices indiqués qui peuvent varier selon les instructeurs. Enfin, le terme du cours comporte une session « sparring », puis quelques étirements si on a le temps. Vous avez récemment organisé un stage avec Keith Farrell sur l’épée longue de J. Liechtenauer, que vous a-t-il apporté ? Ce projet, initié et porté par William (Instructeur épée longue), nous a apporté beaucoup en termes humains aussi bien que techniques. Outre le fait de revoir ou de découvrir l’art de l’épée selon Liechtenauer (jusqu'à fin 2011, seul Vadi était étudié dans l’OGN), nous avons surtout vu les méthodes d’enseignement de Keith, comme la structure des cours ou les types d’exercice. Son professionnalisme, sa truculence et sa convivialité sont un réel bonheur, je conseille à tous les clubs de le faire venir en France. En outre, le fait d’accueillir plusieurs membres venus d’un peu partout en France nous a permis de tisser des liens avec d’autres groupes d’AMHE autrement que virtuellement ou dans de grandes conventions par exemple. Ce que j’en retiens surtout, c’est le souvenir d’un excellent week-end, où j’ai appris plein de choses, où je me suis beaucoup amusé, et où j’ai fait d’excellentes rencontres. Nous espérons pouvoir remettre en place des projets comme celui-ci, aussi souvent que possible. Billet d'humeur de Gaëtan Marain
« Y en a-t-il un seul parmi vous, aussi fort que Socrate, capable, en toutes circonstances, de convertir à ses façons ceux avec lesquels il se trouvait ? Comment le pourriez-vous ? Fatalement, c’est vous qui serez transformés au contact des profanes. Et pourquoi sont-ils plus forts que vous ? Parce que les discours putrides qu’ils tiennent viennent de leurs convictions, tandis que vos belles paroles ne viennent que des lèvres ! Voilà pourquoi elles sont sans vigueur, comme mortes ! »
La remontrance d’Epictète adressée à ses élèves est riche d’enseignements, y compris pour nous autres pratiquants d’arts martiaux. Rien n’est plus frustrant pour quelqu’un qui consacre temps et argent à son apprentissage (matériel, cotisation, venir à la salle plusieurs fois par semaine, participer à des stages, etc.) que d’être dans l’incapacité de le mettre en application. Pendant l’assaut, faute de trouver rapidement ses repères et de vaincre immédiatement, on jette aux orties la théorie laborieusement apprise pour se replier sur un style « instinctif » (au sens de combattre comme un profane) qui, à défaut d’être beau, nous offre la satisfaction trompeuse de la double touche. Au terme de cet assaut malhabile, l’étudiant déçu pourra toujours arguer d’un pourcentage de touches honorable (50-50 ou 60-40). Face à cette attitude d’abandon, les efforts de l’instructeur resteront souvent vains, car la qualité des exercices et des conseils restent de peu d’utilité si l’élève n’y met pas du sien. Il existe en réalité deux niveaux différents de discipline. Le premier consiste à venir s’entraîner régulièrement, à s’exercer sans rechigner et même à faire montre d’un certain entrain. Cette étape cruciale, généralement bien acquise par les pratiquants, est malheureusement insuffisante. L’art martial relève d’une démarche personnelle. Son intégration requiert l’implication du pratiquant. On en arrive au deuxième seuil de discipline. Ce dernier consiste à s’efforcer constamment de mettre en application les conseils reçus, surtout pendant l’assaut. L’incorporation des techniques repose sur un acte volontaire de l’escrimeur. C’est une tournure d’esprit à prendre. Dans mon expérience, cela s’est concrétisé par le passage du souhait de vaincre ou de placer le plus de touches possible à celui d’appliquer un art. Évidemment, la transformation n'est ni immédiate, ni totale. De plus, comme pour beaucoup de choses (arrêter de fumer, se mettre au footing, reprendre le sport après une blessure, etc.), le départ est très laborieux. Pourtant, petit à petit, on finit par renforcer un point particulier puis par l’acquérir complètement. Une fois que la technique concernée est passée plusieurs fois au crible de l’assaut, elle intègre le nouveau socle sur lequel le combattant peut s’appuyer. En cas de stress ou de coup dur, ce socle servira de refuge, inversement, au moment d’élaborer une stratégie, il servira de rampe de lancement pour des techniques complexes ou encore mal acquises. Au fur et à mesure du temps, ce socle technique grandit en même temps que la confiance de l’escrimeur. Ce cercle vertueux sera désormais difficile à briser (sauf, peut-être, en cas de blessure ou de mauvais coup). Toute cette logique repose sur un acte fondateur qui ne peut provenir que de l’escrimeur lui-même. La conclusion de ce papier est la suivante : si vous avez l’impression que pendant l’assaut rien ne passe et qu’un sentiment de frustration vous envahit, analysez votre intention au moment de l’assaut. Qu’essayiez-vous de faire, de prouver, de donner ? Si la réponse ne vous satisfait pas, essayer d’orienter votre volonté vers la mise en application de l’art. |
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